Ce lundi 10 février, la fraîcheur matinale n’a pas « refroidi » les auscitains impatients de découvrir « la Magie de l’hiver en Suisse ». Ils ne la découvriront que le soir après avoir résisté à de multiples arrêts ponctuant de nombreux Kilomètres… Découvrir, un terme peu judicieux en l’occurrence… Le lac de Genève n’est qu’une nappe brumeuse aux contours incertains. Mais notre accompagnatrice, Nelly, qui connaît parfaitement la région, nous certifie que nous longeons bien les rives du lac et que nous arrivons à Genève. La ville, la plus peuplée de Suisse après Zurich, accueille plus de quatre cent organisations non gouvernementales et le plus grand nombre d’organisations internationales au monde dont le siège européen des Nations Unies. Elle est le centre mondial de la diplomatie et du secteur bancaire.
La pénombre n’affecte pas le moral du groupe. La nuit tombe. Le paysage s’orne des lueurs du soir. Telles des lampions, elles s’emparent de l’obscurité et métamorphosent les versants des montagnes en une farandole lumineuse. L’arrivée à Martigny, notre lieu d’hébergement est imminente. Après ce long parcours, nous franchissons avec plaisir le seuil de l’hôtel, « la Porte d’Octodure », établissement coquet dont nous apprécierons tout au long du séjour le confort, la qualité des repas et la cordialité du personnel.
Quelques heures de sommeil, et nous voilà prêts à entrer dans l’univers grandiose et fascinant de la montagne… sous un ciel obstinément maussade. Nous visitons Martigny, petite ville du canton du Valais dominée par le château de la Bâtiaz construit au XIII°. Si l’amphithéâtre roman du Vivier a retenu notre attention, c’est sans nul doute la structure moderne ornant un des nombreux ronds-points de la ville qui a tenu notre curiosité en éveil durant tout le séjour: cette oeuvre d’art symbolise l’entente entre la Suisse, la France et l’Italie…
Gare de Martigny, nous montons à bord du Mont Blanc Express jusqu’à Châtelard. Le train serpente le long de la vallée du Trient dans un écrin de verdure enneigé. Le mauvais temps ne nous permettra pas d’apprécier pleinement la beauté du paysage de cette vallée au coeur de l’espace du Mont-Blanc, mais c’est quand même avec regret que nous quittons la petite gare suisse pour rejoindre le bus et partir à Chamonix, station de villégiature de la Haute Savoie réputée pour ses pistes de ski.
Aujourd’hui, il faudra deviner les massifs légendaires des Aiguilles Rouges et du Mont Blanc dissimulés dans les nuages…Les conditions météorologiques ne s’améliorent guère et nous plongent dans de profondes méditations.. Que faire? Certains opteront pour le confort d’un café. D’autres « s’offriront » un voyage à travers la minéralogie alpine de Fance, d’Europe et du monde en visitant « le musée des Cristaux ». Le petit train de Chamonix permettra à un groupe de parcourir, sans se mouiller, les rues de la ville. Après de nombreuses hésitations, des téméraires se hasarderont à prendre le train à crémaillère du Montenvers. Une éclaircie leur permettrait-elle d’entrevoir la « Mer de Glace »? Elle était là, à 1913 mètres! Certes localiser les Drus, les Grandes Jorasses ou les Grands Charmoz drapés dans leur manteau de brouillard s’avérait difficile…Mais quand même! Quelle merveille ce plus grand glacier de France! Comment ne pas penser à ces illustres pionniers qui foulèrent pour la première fois le toit de l’Europe le 8 août 1786 ?
Un télécabine et … quelques deux cent marches amènent les curieux à l’entrée scintillante de la « Grotte de Glace », un temple de la nature, un véritable chef d’oeuvre creusé chaque année dans les entrailles du glacier. Un parcours dans un univers bleuté jalonné de messages sur la rapidité des conséquences du réchauffement climatique. Instructif et inquiétant!
L’annonce d’une meilleure météo pour la journée du lendemain a rapidement balayé l’humeur boudeuse que l’on avait senti flotter dans le car au retour. Humeur boudeuse définitivement dissipée en dégustant un verre d’Hugo, ce cocktail légèrement alcoolisé originaire du Tyrol du Sud préparé à base de liqueur de fleurs de sirop, de Prosecco et de feuilles de menthe…Le « fendant », le trésor du Valais, ce vin alliant fraîcheur et fruité, ravira aussi les papilles. N’oublions pas que le canton possède le plus grand vignoble de Suisse. Les vignes se superposent accrochées les unes aux autres sur des terrasses retenues par des murets de pierres sèches escaladant les pentes abruptes. Un séduisant paysage pittoresque!
Le mercredi matin, confiants, nous partons en car dans la vallée de la Zermatt, la « Mattertal » en allemand, jusqu’à la gare de Täsch. Direction Zermatt, situé au pied du Cervin. Changement « d’aiguillage », nous prenons le seul train à crémaillère circulant sur la plus haute voie ferrée d’Europe. La ligne se faufile dans la forêt de mélèzes encapuchonnés de neige, franchit d’impressionnantes gorges, emprunte de nombreux ouvrages d’art tel le pont ferroviaire de Findelbach, puis fend limmensité blanche jusqu’au sommet du Gornergrat à 3121 mètres! Les portes du Paradis blanc! Une vue fascinante! Magique sous un soleil hivernal étincelant! Imposant, solitaire, le Cervin se dresse à 4478 mètres au centre d’un panorama alpin à couper le souffle. Majestueuse, la dent rocheuse perce le ciel. Frileuse, elle gardera son écharpe de brume.
Alpinistes chevronnés, nous affrontons le dénivelé … de quelques mètres jusqu’à l’observatoire construit dans les années 1960, le meilleur observatoire d’Europe centrale. La plateforme offre une vue exceptionnelle sur de vertigineuses montagnes de plus de 4000 mètres d’altitude… Des passages verglacés rendront le retour à la gare du Gornergrat plus périlleux… et parfois s’accrocher à la main courante n’était pas superflu… Sans nul doute, notre agilité aurait inspiré à Robert Frison-Roche, un des maîtres de la littérature de montagne, l’écriture d’une version corrigée de « Premier de cordée »…
Difficile de s’arracher à la beauté envoûtante du Matterhorn, à ces reliefs délicatement estompés par l’épaisse couverture blanche… Nous reprenons le train et partons arpenter la rue principale de Zermatt, la « Bahnhofstrasse ». Promenade en toute quiétude dans ces rues piétonnes, la circulation étant interdite dans le village depu
is 1972. Seuls résonnent sur les pavés les sabots des chevaux tractant de confortables calèches… plus ou moins sophistiquées selon le « standing ». L’altitude et le domaine skiable font de cette ville la station la plus réputée de Suisse et d’Europe. Mais elle a su garder l’aspect typique du village valaisan. Dans les petites rues se cachent les « raccards », ces petits bâtiments ruraux en bois perchés sur pilotis où les paysans stockaient autrefois denrées alimentaires, vêtements, outils et parfois même des documents importants. Souvent couverts d’ardoises, quelquefois de « tavaillons », sorte de petites planchettes de bois, ils représentent un véritable patrimoine. Place centrale, se dresse l’église St Mauritius dont la sobriété extérieure contraste avec ses trois autels baroques et la richesse de sa voute décorée d’une belle arche de Noé.
Une journée exceptionnelle ce mercredi! Une parenthèse enchantée clôturée par un diner préparé dans la pure tradition suisse, une raclette servie de main de maître par le cuisinier suivie d’une glace à l’abricot arrosée « d’abricotine »… Miam, miam, aurait dit Nelly.
Le lendemain, nous partons en direction de Montreux situé en bordure du lac Léman. Aujourd’hui, malgré la grisaille, le lac daigne nous révéler sa forme d’immense croissant alimenté par le Rhône. Niché entre la Suisse et la France, entouré par les montagnes du Jura et des Alpes, c’est le plus grand lac d’Europe occidentale. Il offre à Montreux un cadre idyllique qui lui vaut le surnom de « Perle du Léman ». Un arrêt obligatoire s’imposait au château de Chillon trônant sur son ilot rocheux. Erigé au XIII° par la famille de Savoie pour contrôler le passage le long du lac Léman, il a été successivement arsenal, prison, résidence des comtes de Savoie… et source d’inspiration pour de nombreux écrivains : Jean Jacques Rousseau y situera une scène de son roman « la Nouvelle Héloïse ». Reprenons la route vers Montreux. A la promenade au bord du lac entre les palmiers et à la découverte des richesses architecturales de cette charmante ville devenue mondialement célèbre grâce à son fameux festival de jazz, nous préférons l’évasion dans les alpages et prenons le train, le « Golden Panoramique Belle Epoque ». Une invitation à l’aventure. Un moment unique à savourer dans le confort, le romantisme et la nostalgie de cette période où l’élégance et le raffinement dictaient les influences vestimentaires. Il est vrai que « doudounes », bonnets et chaussures de marche étaient peu appropriés dans ce décor où le moindre détail est recherché…tissus de velours, porte vêtements en cuivre, plafond en boiserie…
Au départ de Montreux, le train surplombe le lac Léman puis s’engouffre dans la vallée. Il serpente quelques kilomètres en terre gruérienne, un coin de pays enchanteur où le temps semble geler, une immersion totale dans la nature environnante. Au fil de l’ascension, la vue s’ouvre sur un paysage alpin toujours plus grandiose. Les paysages défilent, riches exploitations agricoles, grands pâturages, mazots perdus dans le cadre paisible de ces grands espaces … La féerie de ce paysage cotonneux nous ravira jusqu’à notre arrivée à Gstaad. Dominée par son hôtel cinq étoiles, cette station de ski est un lieu de villégiature huppé fréquenté par l’élite internationale du monde des affaires et du spectacle.
Se promener dans Gstaad, c’est aller de sculptures en sculptures…Du Canard assis au veau Rosie, oeuvre sponsorisée par la star hollywoodienne Liz Taylor sans oublier d’admirer au passage les deux musiciens à l’entrée de la chapelle Saint Nicolas.
Se promener dans Gstaad, c’est aller de joailleries en horlogeries, de magasins de haute couture (très haute couture)en galeries d’art.
Mais se promener dans Gstaad, c’est aussi admirer ses prestigieux chalets. Le village a préservé son patrimoine architectural. Le bois y règne en maître : façades aux détails sculptés, balustrades en bois, volets colorés et frises décoratives.
Dernière étape de la journée, Gruyères, un des centres de fabrication du fameux fromage AOP élaboré bien évidemment avec le bon lait des vaches suisses, des vaches heureuses selon la formule consacrée de Nelly… Des Red Holstein ou des Montbéliardes élevées avec la plus grande attention par des paysans soucieux de leur confort et de leur sensibilité musicale. Mais oui! Des études sérieuses menées par des chercheurs de l’université de Leicester en Grande Bretagne prouvent que la musique rendraient les vaches laitières plus productives…
Jetons un coup d’oeil sur la cave d’affinage, un surprenant alignement de meules. Bien sûr, nous ne pouvions partir sans goûter et re-goûter ni le célèbre fromage ni la non moins célèbre « meringue double crème »… Un nombre de calories amplement suffisant pour nous permettre d’arpenter sans défaillir les rues de
Gruyéres. Cette charmante petite ville médiévale du canton de Fribourg a gardé toute son authenticité. Nous empruntons la rue principale, la rue du Bourg, bordée de petites échoppes artisanales proposant fromages et chocolats. Nous nous attardons devant les vieilles maisons à fenêtres géminées abritées sous de larges auvents; près de la fontaine communale, un bel ouvrage de ferronnerie représente l’emblème de la ville et de la région qui l’entoure, la grue. La rue piétonne conduit au château des comtes de Gruyères perché sur la colline dominant la vallée de la Sarine. Le panorama s’ouvre sur les Préalpes fribourgeoises. En contre bas, l’église Saint Théodule arbore un magnifique clocher bulbe, caractéristique de l’architecture religieuse baroque.
L’horaire ne nous permettra pas de visiter le musée HR Giger, consacré à Hans Ruedi Giger, le créateur du design du xénomorphe dans la série du film Alien. Seules les quelques oeuvres exposées à l’extérieur du musée nous entraînent dans le monde de l’art fantastique de l’artiste.
Le soleil aurait-il des remords et se déciderait-il enfin à se lever sur le lac Léman alors que nous quittons la Suisse? … Bientôt, à l’horizon les contreforts du Jura se dessineront … Nous serons de retour en France… une parenthèse enchantée se ferme…
Un moment particulier pour remercier Nelly de sa disponibilité et de ses talents de narratrice sans oublier de reconnaître la conduite exemplaire de notre chauffeur, Romain.
CH D
galerie 1: Martigny, Chamonix et la mer de glace
galerie 2 : Zermatt, le Gomergrat, le Mont Cervin
galerie 3 : Montreux, Gstaad, Gruyères
galerie 4 : le lac Léman
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